Rompre un contrat, prudence !

Si votre entrepreneur n'éxécute pas le travail auquel il s'est engagé, aux termes d'un bon de commande ou d'un devis signé pour accord par exemple, il ne suffit pas de lui interdire le chantier.

Lorsqu'un créancier est victime de manquements graves de son cocontractant, l'article 1184 du Code civil lui donne un droit à la résolution du contrat. La résolution est une sanction propre à l'inexécution des contrats synallagmatiques.

Le régime légal étant supplétif de volonté, les parties peuvent se dispenser de la résolution judiciaire par une clause résolutoire expresse.

Selon la doctrine majoritaire, la résolution unilatérale décidée d'initiative par le créancier d'une obligation (de payer, de faire ou de ne pas faire) est soumise à des conditions strictes :

    le débiteur de cette obligation doit avoir commis une faute contractuelle suffisamment grave pour justifier la résolution du contrat;
    le créancier doit, en principe (voyez les exceptions ci-après), avoir mis son débiteur en demeure de s'exécuter dans un délai raisonnable, c'est-à-dire le dernier délai que lui accorderait le juge sur la base du principe de l'exécution de bonne foi des conventions;
    la décision de résolution unilatérale doit être notifiée au débiteur en exprimant de manière claire et non équivoque la décision de résoudre la convention et en précisant les manquements qui fondent la sanction au risque de voir son acte interprété comme une résiliation du contrat pour convenances personnelles;
    des circonstances exceptionnelles doivent justifier la résolution unilatérale. En l'absence d'autorisation contractuelle pour se dispenser d'un contrôle judiciaire préalable, le créancier doit pouvoir justifier qu'un dernier délai accordé par le juge a perdu tout son sens. De telles circonstances exceptionnelles peuvent résulter notamment de l'urgence de la situation, de l'impossibilité d'exécuter le contrat, de l'obligation pour le créancier de restreindre son dommage ou encore de la rupture du lien de confiance nécessaire entre les parties.

La Cour de cassation a confirmé la nécessité des trois premières conditions aux termes de son arrêt du 16 février 2009 (JT, n°6396, 22 mai 2010)

La résolution unilatérale ne peut être mise en oeuvre qu'après que le débiteur ait été mis en demeure conformément à l'article 1139 du Code civil, c'est-à-dire soit par une sommation ou un autre acte équivalent, soit par l'effet de la convention lorsqu'elle porte que, sans qu'il soit besoin d'un acte, et par la seule échéance du terme, le débiteur sera en demeure de s'exécuter. Il y va ainsi pour toutes sanctions applicables en cas d'inexécution. Cette obligation de mise en demeure souffre cependant certaines exceptions. En effet, certains textes dispensent le créancier de cette formalité (voyez e.a. l'article 1436 du Code civil en matière de récompenses entre époux). En outre, le dit article 1139 étant supplétif de la volonté des parties, celles-ci peuvent se dispenser d'une mise en demeure. Enfin, selon la jurisprudence de la Cour de cassation, la mise en demeure est inutile lorsque l'exécution en nature de l'obligation est devenue impossible ou n'offre plus d'utilité pour le créancier, ou encore lorsque le débiteur de l'obligation a fait savoir qu'il ne s'exécuterait pas.

Jus est ars boni et aequi
Le droit est l'art du bien et de l'équitable